Avec 252 habitants à son actif, cette commune génère et attire pratiques écologiques vertueuses et communauté solidaire. Ses marqueurs identitaires et historiques ont fait de ce village un exemple à suivre.
A bien y réfléchir, penser les ruralités en termes d’éco-lieux, d’éco-quartiers, d’éco-hameaux, induit sémantiquement, mais aussi dans les faits que rien, en dehors de ces créations de toutes pièces n’existe vraiment déjà sur nos territoires.
Montflours, 252 habitants à quelques encablures de Laval. Credit photo: Elodie Louchez
Le Bâtiment de l’Archipel qui s’étend sur 600m2 Credit photo: Elodie Louchez
Son histoire explique pour partie l’identité énergique de la communauté montflouraise, et qui détermine par la même son futur. Le village, autrefois scindé en deux entre paysans et ouvriers exploités à la minoterie du village voisin s’est forgé une conscience sociale et environnementale de fait.
Les ouvriers, brisés par le travail et le contact de l’amiante ont nourris un sens de la révolte collectif, tout comme les petits paysans du village croqués par les grands syndicats agricoles. Cette communauté soudée par la dureté avait trouvé sa raison d’être à vivre ensemble et vivre bien.Cédric Soufflet tout comme Gilles Carpentier portent sans aucun doute en eux les racines intrinsèques de Montflours. Autrefois élus au conseil municipal, ils se sont échappés au profit de la construction de l’Archipel, une SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif) réversible et écologique, portant à bout de bras entrepreneurs engagés et citoyens volontaires, la plupart habitants de la commune. Au départ, l’envie de s’installer pour Cédric, de « changer » de vie, ou plutôt de trouver sa vie, après le travail social, la création d’une brasserie artisanale, mieux même une filière brassicole locale, autonome en houblon local.
« Moi je suis arrivé en 1997 à Montflours, je voulais porter le projet de la brasserie en incluant tous les paramètres sociaux, humains et écologiques pour cette activité ».
Ce désir, Gilles, directeur artistique de sa propre agence de pub le partageait, et l’avait formalisé en s’installant loin des brouhahas parisiens à Montflours pour délivrer ses talents au profit du village. « En débarquant, notre but n’était pas d’empiéter sur le milieu agricole mais d’optimiser des projets régionaux laissés sans suite. On a utilisé ce qui nous était offert.»
Le déclencheur fut la création de la Ferme Radis & Co.
Alors Montflours génère t-elle de fait cet accueil? Il faut le croire puisqu’au tout départ de ces projets, c’est Terre de liens, (association de reprise agricole) qui avait racheté une ferme du village avant de l’allouer en 2011 au Gaec Radis & Co, une ferme de 40 hectares voulue comme collective avec cinq producteurs bio, deux maraichers, un éleveur, un fromager et un paysan boulanger. Cédric y avait d’ailleurs installé ses premiers plants de houblon en 2011 pour lancer son activité de brasseur. Et lancer l’idée de l’Archipel dans la foulée. Une foulée bien longue puisqu’il fallut convaincre banques, sociétaires, institutions pour que 6 ans plus tard le projet surgisse de terre dans le cadre des valeurs pensés ensemble, en SCIC.
Cédric en tient la gestion précisément : « La SCIC permet d’accueillir tout type de membre au sein du capital. Chaque personne est une voix dans l’esprit de soutenir un projet coopératif. À ce jour, 125 sociétaires de tout univers ont apporté 112 000 € pour un budget global hors taxes de 430 000 €. Et puis, nous avons été soutenu à hauteur de 18 % de subventions de la Région et de Laval Agglo. Le soutien de la mairie est uniquement moral. »
L’Archipel devait être l’épicentre de tous les projets des habitants.
L’idée, dans cette démarche d’économie sociale et solidaire est que chaque entreprise accueillie ait son espace pour continuer à œuvrer en milieu rural, de le faire vivre, et de partager les biens communs comme les camions, l’électricité produite par les panneaux photovoltaïques du toit, et certains outils. La brasserie BAM gérée par Cédric occupe ainsi le plus grand espace tandis que l’entreprise Amisun, spécialisée dans la pose et l’entretien de panneaux photovoltaïques, a investi 100 m2. Les autres acteurs sont 42 Délices, une entreprise de de produits végétaux crus et déshydratés à 42 degrés labellisée Nature et Progrès, Futur simples, une herboristerie de simples, des plantes aromatiques et médicinales, et un espace de brocante-recyclage. Que des acteurs locaux pour une gouvernance locale.
Gilles est aujourd’hui président de la SCIC, investi à 200% autour de ce noyau de vie, construit en tout point durablement, grâce aux bons soins d’artisans pour le corps même mais aussi avec ses sociétaires pour l’habillage et isolation bois, tout comme les expertises bénévoles d’un comptable ou d’un avocat. « Ici pas d’angélisme, on peut rêver, avoir de grands projets mais il faut que ça marche aussi économiquement pour tous. »
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Il y a aussi la Guinguette associative en bord de Mayenne. Et chaque Vendredi, le four à pain tourne pour tous les habitants, les uns les autres venant socialiser autour de la cuisson de sa pizza hebdomadaire. Et générer une spirale vertueuse autour des projets de chacun. Là, une vannière venue installer son activité, ici, l’extension prévue de l’Archipel à d’autres entrants, l’ouverture à d’autres producteurs pour le marché hebddomadaire bio, l’entretien de la mini-forêt municipale, ou comment accueillir les 25 nouveaux arrivants dans la commune en habitat léger.
Le cœur battant de la cité en quelque sorte.
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